Une fois encore, fidèle à l’esprit qui l’anime à chacune de ses créations, depuis les Racines jusqu’au Bon Saint Pourçain, c’est d’abord une envie qui porte David Lanher pour lancer, cette rentrée 2021, son nouveau restaurant : Cèna.
Une drôle d’envie. Du moins, une envie particulière. Une envie qui ne se cuisine pas tout à fait, une envie qui ne se mange d’ailleurs pas vraiment mais une envie qui alimente le plaisir autant qu’elle se nourrit de jolies valeurs. Cèna, c’est donc l’envie sincère d’un restaurant de proximité.
Proche encore du côté de ce sous-sol où les copains, copines, compères, collègues, comparses trouvent à se retrouver dans l’intime d’un très particulier salon en cave. Proche comme la jeunesse du trio placé aux commandes de l’adresse. Trois frais talents, formés aux maisons de conséquence et désireux, ensemble, de partager leur conviction d’une maison où la souplesse de l’atmosphère n’interdit pas l’exigence du métier.
Nicolas Giraud en salle
En salle, Nicolas Giraud, 28 ans, passé par le Luberon d’Edouard Loubet, l’Australie, Le Courchevel du Chabichou et le Paris de Pierre Gagnaire, choisit d’orchestrer un service en petite musique, mélange de gestes sûrs et de connivence heureuse.
Du côté de la sommellerie, Lucas Hubert, 24 ans, ancien de la Pyramide à Vienne, du Zinc à Grenoble et d’Antoine à Paris, plaide, sans sectarisme ni œillère, une carte des vins, œcuménique à dispenser flacons de classiques aussi bien que pépites et révélations d’une vigne nature lorgnant vers le la Loire, la Bourgogne, la Savoie.
Proche comme l’inattendu du quartier, ce 8ème arrondissement que l’on n’attendait pas (ou plus), cette parenthèse élégante et modianesque des abords Monceau, beau quartier soudain en revanche, ravi de se retrouver une table incarnée.
Et cette table, n° 23 de la rue Treilhard, en place depuis bientôt un siècle, dans ses joies, dans ses spleens mais épatante d’avoir vécu, d’avoir duré et de se retrouver aujourd’hui de nouvelles années 20.
Proche comme cette terrasse de ciel bleu qui d’un petit charme de trottoir parisien invente soudain une bucolique citadine. A sa suite, cet intérieur qui, sans en rajouter, offre d’office sa complicité. Mise en scène signé du Studio Ex æquo Magalie Varcourt et Xavier Predine où chaque table se dispose face banquette et cette banquette, petit bijou plein cuir et bois précieux, épatante à tourner tout autour de la salle. Une banquette craquante, spirituelle qui s’amuse de quelques miroirs, installe le novice dans la peau d’un habitué et tisse l’ambiance comme on tire un invisible lien.
A quoi reconnait-on un décor réussi ? Peut-être à ce qu’avant même le premier client du premier déjeuner, il y a déjà là la bonne humeur d’un climat.
Alban Chartron, aux fourneaux
Aux fourneaux enfin, Alban Chartron, 32 ans, natif d’une certaine Collonges-au-Mont-d’Or, cuisinier touchant à raconter son parcours d’exception comme un véritable parcours de vie (Villa Florentine à Lyon, Louis XV à Monaco, Pic à Valence, l’Hôtel de Ville à Crissier chez Benoît Viognier).
Proche comme cette carte énergique, ramassée sur l’essentiel (quatre entrées, quatre plats, quatre desserts), au rebond des saisons, soucieuse du produit intègre et portée par un réel instinct de chef. Une carte mouvante, évolutive, parfaite à saisir des recettes composées au plus près de la saveur, organique à ne pas dénaturer les saveurs, technique sans être démonstrative. La cuisine d’Alban lui ressemble. Une cuisine dans l’émotion, une cuisine de belle proximité, une cuisine qui ne raconte pas autre chose qu’un moment de partage.
Cena
23, rue Treilhard
75008 Paris